Insolite : un papillon pilote un robot grâce à son odorat

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Les robots s'insèrent petit à petit dans notre quotidien. Ils possèdent déjà la vue, l'ouïe et le toucher - dans une certaine mesure - et seront bientôt dotés de l'odorat. Des scientifiques du Centre de Recherche pour la Science Avancée et la Technologie de l'Université de Tokyo  se sont penchés donc sur un projet de robot capable de percevoir certaines odeurs comme le gaz, l'essence ou des produits chimiques, un sens essentiel pour limiter  les accidents domestiques. . Le prototype mis au point, les scientifiques laissent les commandes au pilote le plus aguerri de leur entourage : un papillon de nuit.
 
Avant de faire l'essai avec cet insecte, les chercheurs avaient eu recours aux services d'un cafard. Les résultats furent surprenants, mais non convaincants : le cafard réussissait à piloter le robot de façon aisée, mais se dirigeait à tâtons vers les odeurs censées le guider. Or l'hésitation n'est pas permise durant l'apprentissage de l'odorat. Les essais reprirent et l'insecte fut remplacé par un bombyx de mûrier, un papillon originaire de Chine. A l'état de ver, il est réputé mondialement pour la qualité inégalée de sa soie. Ce spécimen fut choisi après une étude comportementale qui mit en exergue sa capacité à détecter les phéromones des femelles de son espèce. Il effectue alors une danse rituelle faite de lignes, réaction qui sert de modèle à la réactivité du système neuronal du robot.
 
Des tests prometteurs
Le robot utilisé, pensé pour ces essais en particuliers, a été fabriqué pour ce papillon. Ce dernier, enfermé dans l'engin, est posé sur un capteur de mouvements. Chacune des impulsions de l'insecte est transformée en signal électronique, envoyé au système de direction autonome du robot, qui se déplace donc tout seul. Enfermé dans la machine, l'insecte avait accès aux odeurs grâce à un petit ventilateur. Sur les 14 Bombyx qui firent l'essai, 14 réussirent à diriger le robot jusqu'aux phéromones de femelles recherchées.Après le test directionnel, vint le test d'adaptation à l'environnement.
Ce test consiste, dans sa première étape, à modifier volontairement les trajectoires du robot par des éléments extérieurs. Ainsi, les chercheurs peuvent déterminer si le robot est facilement dirigeable, mais surtout observer la vitesse de compréhension du papillon. Ayant le rôle du cerveau du robot, il doit y être parfaitement connecté. Le Bombyx de mûrier, après plusieurs essais, s'adapte, et aborde différentes stratégies pour atteindre son but. La deuxième étape de ce test comprend la modification du temps de réponse du capteur de mouvement : un mouvement du papillon obtenait une réponse immédiate du robot, cette instantanéité est supprimée, en faveur d'un temps de latence de 1 seconde, puis 2 secondes, 5 secondes, etc. Qu'à cela ne tienne ! Le papillon prend les nouvelles données en compte et s'adapte non plus à l'extérieur, mais à la machine elle-même, pour ne faire qu'un avec le robot.
 
Ces deux tests ont été effectués sur une plateforme de 1.8 m de long sur 0.9m de large, équipée de 2 ventilateurs : l'un propageait les phéromones, l'autre provoquait un simple souffle assimilable au vent, et désorientait ainsi le papillon. Sur cette courte vidéo, vous pourrez découvrir  le papillon dirigeant le robot dans des conditions normales (image de droite), et malgré la modification des paramètres environnementaux (image de gauche).
 
Un modèle à perfectionner
Les résultats laissent cependant suggérer que plus de travail est nécessaire pour obtenir un modèle stable et vraiment efficace (seulement 80 % des essais furent des succès). Il n'est bien entendu pas question d'associer éternellement un papillon au robot. L'objectif des chercheurs est de calquer le schéma neuronal de l'insecte et de le reproduire sous forme physique. Les ventilateurs feraient office de "nez" du robot. L'air envoyé sera filtré et analysé par le système informatique, qui agirait alors comme le cerveau du papillon pour guider le robot vers l'endroit où l'odeur est la plus forte quelles que soient les conditions. Grâce à une mémoire interne, le robot sera capable de détecter toute odeur anormale dans une habitation et alerter pour éviter les accidents.
 
 
Sources
Site du Laboratoire Evolution et Diversité Biologique