Erreurs de prix : si c'est trop bas, ça ne passe pas

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Des milliers d'internautes qui ont tenté d'acheter une Nintendo 3DS XL sur le site de la Fnac au prix affiché par erreur à 60 € au lieu des 200 € que coûte normalement la console réclament à l'entreprise d'honorer leur achat. L'enseigne de grande distribution culturelle invoque une erreur légitime et offre à chacun de ces consommateurs un bon d'achat de 15 € pour s'excuser. Le week-end précédent, c'est le cybermarchand Conrad qui avait été victime d’un gros bug : des produits habituellement vendus plusieurs centaines d’euros ont été proposés à prix totalement cassés.

Dans pareil cas, le droit de la consommation protège malgré tout le consommateur, du moins jusqu’à une certaine limite. Le vendeur est en principe engagé par le prix étiqueté même si celui-ci est erroné et avant même le débit sur la carte (l'accord sur le prix suffit pour estimer le contrat conclu). Cependant, si le prix de la vente est "dérisoire", le commerçant peut annuler son exécution, partant du principe que le consommateur ne peut prétendre avoir pris ce prix pour la valeur réelle du bien. Par exemple 27,90 € pour un SSD SanDisk de 480 Go au lieu de 379 €. Bon nombre d’internautes ont flairé la bonne affaire. Certains devraient voir leur commande honorée, d’autres non. Du coup, se pose la question de leurs droits face à ceux du cybermarchand.

Quelles options pour le consommateur de bonne foi ?

Toute la subtilité est de savoir à partir de quel moment le prix de vente devient "dérisoire", et quand le consommateur ne peut avoir ignoré qu'il constituait une erreur. Sur ce point, la jurisprudence est peu fournie (en effet, rares sont les litiges portant sur un prix de vente à arriver devant le tribunal, du fait de la faiblesse du préjudice subit par le consommateur lorsque le commerçant refuse d'honorer un acte de vente), et on ne peut pas déterminer exactement à partir de quel prix (ou pourcentage du prix réel) le contrat de vente serait maintenu par le juge, et son exécution rendue obligatoire. Mais encore faut-il porter l'affaire devant un tribunal, et montrer sa bonne foi.

On sait que le tribunal de grande instance d’Angers a estimé dérisoire "un prix représentant seulement 16 % du prix réel". Inversement, en 1995, la Cour de cassation a refusé d’annuler la vente d’une bague estimée à 460 419 francs, mais vendue 100 000 francs, considérant que le prix de vente n'était pas du à une "erreur d’affichage faisant apparaître un prix dérisoire tel que le consommateur ne peut prétendre avoir pris ce prix pour la valeur réelle du bien". En somme, si le consommateur peut avoir sincèrement cru que le prix auquel est proposé le produit correspond à une offre promotionnelle sincère et sérieuse, la vente est acquise. Si, au contraire, il s'est forcément rendu compte de l'erreur, mais qu'il a voulu en profiter pour obtenir une grosse réduction, alors le magasin est admis à refuser son paiement et à annuler la vente.

Dans les affaires de vente sur Internet, les choses risquent d'être un peu plus compliquées pour les enseignes de commerce en ligne, car les grosses réductions et autres "ventes flash" sont courantes sur la toile. Les acheteurs seront donc d'autant plus facilement admis à réclamer l'exécution de leur achat qu'ils pourront prétendre que celui-ci a été conclu de bonne foi. Mais quand le prix atteint un niveau trop bas, personne ne peut prétendre qu'il croyait être tombé sur l'affaire du siècle.

Sources : 60 millions de consommateurs magazine, PC impact