Fuite de gaz : des dégagements vraiment inoffensifs ?

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Ressentie de Paris jusqu'au sud de l'Angleterre, le dégagement gazeux produit par l'usine Lubrizol dans la nuit de lundi à mardi serait en passe d'être maitrisé. La neutralisation de la fuite de gaz a débuté mardi soir. En parallèle, la ministre de l'Écologie, du Développement durable et de l'énergie a quitté Berlin en urgence et a annoncé l'ouverture d'une enquête.

De la Normandie à la région parisienne, mais aussi jusqu'au sud de l'Angleterre dans la banlieue de Londres, une odeur de gaz – le mercaptan, entre autres utilisé comme marqueur olfactif pour le gaz de ville – a incommodé de nombreux habitants. Ce dégagement gazeux fait suite à une réaction chimique survenue dans le four de l'usine de production d'additifs pour lubrifiants Lubrizol, située à Rouen. Sous l'effet des vents, l'odeur s'est petit à petit propagée dans les rues de Paris pour ensuite traverser la Manche. Pas moins de 10 000 appels ont été reçus par les pompiers à ce sujet, dans la seule ville de Paris.

Alors que la société Lubrizol avait dans un premier temps indiqué être en mesure de résoudre l'incident dans la journée de mardi, la ministre de l'environnement Delphine Batho a finalement fait savoir que la neutralisation pourrait durer encore plusieurs jours. Par ailleurs, cette dernière a annoncé l'ouverture d'une enquête administrative sur l'incident "pour en déterminer l'origine et pour établir les responsabilités de l'exploitant". Pour l'heure, seuls 900 kilos de mercaptan ont été neutralisés sur un total de 36 tonnes, comme l'a indiqué la ministre sur Europe 1.

Quels effets pour la santé ?

Hormis quelques symptômes passagers tels que des maux de tête, la nausée ou encore quelques gênes de cet acabit, l'inhalation de ce gaz ne présente pas de danger, toujours selon la ministre et la Direction générale de la santé (DGS). Cependant, l'Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS) a pour sa part déclaré qu'à forte concentration, le gaz dégagé par l'usine de Lubrizol ne serait pas si inoffensif, s'avérant même toxique. Ainsi, lorsqu'il est dit "linéaire", le mercaptan possède un niveau de toxicité s'approchant de celui de l'hydrogène sulfuré (H2S). Ce dernier, relâché par des algues vertes en putréfaction, avait notamment fait parler de lui en 2011 après avoir provoqué la mort de sangliers.

Cité par Le Nouvel Observateur, le toxicochimiste au CNRS André Picot estime que la toxicité de ce type de gaz, lorsqu'il est de type linéaire, peut toucher le système nerveux central, allant même jusqu'à paralyser le nerf olfactif, à très forte dose. Reste que dans la situation actuelle, la concentration du gaz serait moindre. À noter que l'incident survenu à Rouen n'est pas un cas isolé puisqu'une cinquantaine d'évènements de ce type ont eu lieu de 1988 à 2012.

Sources : ministère du développement durable, Europe 1, Lci, DGS, Le Nouvel Observateur